Écrit par : Ludovic
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Décès de Jean ROUVIÈRE (mars 2016)

Nous avons appris avec tristesse, en mars 2016, à l’âge de 94 ans, le décès de Jean Rouvière, qui était un ami personnel de notre famille, surtout de mon père Raymond, avec qui il avait des souvenirs communs, en particulier parce qu’ils avaient l’un et l’autre, été déportés dans le cadre du STO1.

1 STO (Service du Travail obligatoire) fut, durant l’occupation de la France par l’Allemagne nazie, la réquisition et le transfert vers l’Allemagne de centaines de milliers de travailleurs français contre leur gré, afin de participer à l’effort de guerre allemand que les revers militaires contraignaient à être sans cesse grandissant (usines, agriculture, chemins de fer, etc.).

Jean Rouvière a consacré sa vie à la randonnée pédestre. Grand sportif, passionné de ski alpin, il ne ratait jamais les premières chutes de neige dans les Alpes où il se rendait, tant qu’il a pu, en compagnie de ses amis Jacques et Luc Boissel. Plus jeune, il avait organisé de nombreuses rencontres internationales de skieurs (accueil de skieurs espérantistes venus d’Allemagne, Suisse, Autriche à la base de Salavas, sorties ski de fond, randonnée d’initiation sur le GR 7…) Mais il était par-dessus tout attaché à sa terre ardéchoise. Dès 1967, il avait constitué un groupe de marcheurs qui deviendra en 1972 le Club des randonneurs Vivarois. Convaincu de la nécessité de sauvegarder le patrimoine des sentiers, conforté par une randonnée avec M. Guibal - Jeunesse et Sports - sur le GR 4 des Vans à Thines, terre de ses ancêtres, Jean Rouvière, malgré la modestie qui était une de ses marques de fabrique, accepta de devenir, en 1972, le 1er Président du Comité puis délégué départemental du Comité des Sentiers de Grande Randonnée. En sa qualité de délégué départemental, il était alors chargé de la gestion et de l’entretien des principaux sentiers créés en 1946/1947, dont le GR 7, GR 4 et le GR 42 en relation avec le Docteur Cabouat et Philippe Lamour. Il fît appel aux bonnes volontés pour baliser et débroussailler, régler, avec patience et gentillesse, les problèmes de passage sur les propriétés privées, principal obstacle au tracé de nouveaux sentiers. Avec le renfort du Club des Randonneurs Vivarois, de l’armée et d’une équipe de l’Hôpital Sainte Marie à Privas, il constitua une équipe de baliseurs décidés. Il créa aussi la commission technique départementale dont il assura la présidence jusqu’en 1989. Au cours de cette présidence, de nouveaux sentiers vinrent renforcer le réseau existant GR®44 jonction entre GR 9 et GR 4 (sentier Autriche-Espagne), GR 430 : chemin de St régis, les GRP Mezenc-Gerbier, Tanargue, Cévenol, Tour de la Montagne ardéchoise. Dans le cadre du programme Monts et Merveilles (Etat), il créa le GR 420 (Tour du Pays de Vernoux) et sa variante en collaboration avec Chamina, il a dû parcourir l’Ardèche pour, là encore, convaincre les propriétaires de gîtes placés sur les GR® et GRP® afin qu’ils fassent les démarches pour obtenir l’agrément leur permettant d’accueillir des randonneurs. Jusqu’en 2012, malgré l’âge et les problèmes de santé, Jean Rouvière resta un randonneur dans l’âme et participa assidument aux assemblées générales du Comité en se joignant à la marche organisée pour le 30ème anniversaire de sa création2.

2 Extrait de « Portrait : Jean Rouvière, fondateur du Comité départemental de la randonnée pédestre de l’Ardèche ». Balises 07, n° spécial, avril 2014.

A titre personnel, Jean Rouvière avait rejoint Cévennes Terre de Lumière dès son origine : Il avait en effet participé, le 28 février 1976, à la fondation de notre association lors de la toute première réunion tenue au Château d’Aubenas car il nous avait dit être intéressé par notre démarche, à l’époque révolutionnaire : « associer randonnée pure et découverte de la nature et du patrimoine » ce qui était en quelque sorte notre « marque de fabrique ».

Grâce à lui, nous avons aussi beaucoup randonné sur les chemins des Cévennes. Nous nous souviendrons toujours de la nuit passée, en avril 1982, dans sa maison de famille à Thines, et des pas de mulets taillés dans le rocher qu’il nous avait montrés lors d’une randonnée entre Thines et Montselgues3.

3 « De Thines à Montselgues », in : Cévennes Terre de Lumière trim., n°17 (avril 1982) et « Les pas de mulets sur la voie romaine du Petit Paris », N° spécial du XXe anniversaire, Cévennes Terre de Lumière trim. Nouvelle série, N°1/1983.

Dans les années 2000, alors que nous étions en butte à une cabale visant à nous déstabiliser, il nous avait apporté un soutien indéfectible. Nous nous souviendrons toujours de la colère qu’il piqua, lui qui était la courtoisie incarnée, contre ces « minables usurpateurs », après que nous lui ayons raconté les manœuvres visant à nous chasser de l’association que nous avions créée. Car si quelqu’un ne pouvait tolérer la trahison ni les compromissions, c’était bien un homme comme lui, cévenol intransigeant jusqu’au bout des ongles. Il nous avait alors assuré de sa fidélité, fidélité qu’il nous a conservée jusqu’à ses derniers jours : en effet, peu de temps avant d’apprendre son décès, nous lui avions téléphoné et il nous avait assuré qu'il restait adhérent et abonné, même si son âge et ses problèmes de santé l’empêchaient de participer à nos activités. Nous garderons de Jean le souvenir d’un homme d’une grande simplicité, toujours joyeux et plein de bienveillance. Toutes nos condoléances à ses enfants.